LES RÉCENTES ACTUALITÉS RELATIVES AUX "PHÉNOMÈNES AÉROSPATIAUX NON IDENTIFIÉS"
Rédaction collective de la Commission technique 3AF SIGMA2
Auteurs: Jean-Marc André, Philippe Chopin, Joël Deschamps, Luc Dini (Pdt SIGMA2), Gérard Labaune, Geoffrey Mestchersky, Stéphane Pfister, Emmanuel Plichon, Raymond Piccoli, Jean-Pierre Rospars, Nadia Tronche, Beatriz Villaroel.
CET ARTICLE A ÉTÉ PUBLIÉ DANS LA LETTRE D'INFORMATION DE L'ASSOCIATION FRANÇAISE DE L'AÉRONAUTIQUE ET DE L'ASTRONAUTIQUE ET EST REPRODUIT ICI AVEC AUTORISATION, TOUS DROITS RÉSERVÉS
L’année 2023 a été riche en événements PAN (UAP en anglais pour Unidentified Anomalous Phenomena), phénomènes « anormaux » non identifiés, largement marquée par l’actualité américaine, mais aussi par des répercussions ailleurs dans le monde, via différentes conférences scientifiques. Ces sujets internationaux ont été largement développés dans la lettre 3AF N°1 parue en janvier 2024.
Bien entendu, la parution du rapport AARO (All-domain Anomaly Resolution Office) du Pentagone le 6 mars 2024 fait l’objet d’un court commentaire en début de cet article, car il apporte peu d’informations nouvelles sur l’actualité des PAN ainsi que des commentaires superficiels sur les cas et projets du passé, il y a cependant quelques imprécisions. Il s’agit finalement d’un rapport affirmant une posture officielle (ce rapport de l’AARO n'est cependant pas publié cette fois-ci par l’ODNI (Office of The Director of National Intelligence) sur le caractère ordinaire de ces phénomènes. Il contredit non seulement le questionnement sur les caractéristiques étonnantes et hors normes jusqu’alors constatées depuis 2020 dans les rapports successifs, mais aussi celles signalées depuis 2004 par l’US Navy et exposées conjointement par la NASA et l’AARO, le 31 mai 2023.
Cela semble donc également en contradiction avec les directives GENADMIN diffusées par le Pentagone le 23 mai 2023 aux forces combattantes américaines déployées sur la planète, pour rendre compte de leurs observations dans les heures suivant des évènements UAP (spatiaux, aériens, aquatiques et transmedium) suivant une procédure spéciale dédiée aux rapports sur les UAP. Les caractéristiques hors norme de ces derniers sont décrites sans ambiguïté dans cette procédure.
Enfin, cela semble aussi en contradiction avec les questions posées depuis 2021 par le Congrès et admises par le Pentagone, par le biais de l’UAP Task Force puis l’AARO, sur les cas non expliqués qui pourraient avoir une origine inconnue, voire extérieure, « exo-terrestre », présentant des caractéristiques échappant aux enveloppes de performances connues (environ 8 cas en moyenne par an recensés aux USA répondant à de tels critères depuis 1998). Il semble donc que l’AARO adopte cette fois une posture en retrait, ou même de déni, en rejetant les observations de comportements inhabituels rapportés dans des cas pourtant issus d'autres instances gouvernementales, en affirmant qu’aucun cas ne semble avoir un comportement inhabituel qui pourrait laisser penser à une origine extérieure, et qu’aucun programme de recherche secret ne se serait intéressé à la question. Or les cas passés, historiques des années 50 et 60, comportent de nombreuses caractéristiques étonnantes, encore constatées dans les cas récents.
Du côté français et de SIGMA2, nous avons préféré, cette fois, nous concentrer dans cet article à présenter un aperçu des travaux techniques menés par nos experts, sachant que SIGMA2 a réalisé de nombreuses communications techniques en 2023 tout en continuant différentes études (analyse des données radar sur le cas de Jersey, analyse de matériaux, etc…). Ces exposés sont aussi l’occasion d’échanger avec des scientifiques étrangers.
LES SURPRISES DE L’AARO : NOUVELLE ANNÉE 2024, NOUVEAU RAPPORT, CAS ANCIENS
Nous avions déjà fait un résumé de l'environnement international sur les PAN dans la lettre 3AF parue début janvier 2024. Toutefois, les auditions menées par le Congrès début mars 2024, incluant le témoignage d’un pilote de F-16 de l’USAF ainsi que la parution du nouveau rapport AARO le 6 mars 2024, nécessitent de consacrer quelques lignes à ces nouveaux éléments, sur fond de départ du Dr Kirkpatrick, directeur de l’AARO, début 2024, actuellement remplacé par un directeur intérimaire.
La première partie du rapport de l’AARO est consacrée au passé afin de répondre aux demandes du Congrès d’étudier les cas anciens depuis les années 1945 et de les ajouter à la base de connaissance des cas présents. Il s’agit en même temps de faire la lumière sur l’existence éventuelle de projets de recherche cachés sur les OVNIs, qui auraient été menés par le Pentagone ou les services de renseignement, depuis 60 ans, c’est à dire depuis la fin du dossier Blue Book d'enquête sur les UAP par l’US Air Force.
En réalité, le nouveau rapport de l’AARO comprend environ 50 pages à comparer aux 17 pages habituelles. Il semble être aussi une réponse indirecte aux questions posées par les déclarations de lanceurs d’alerte sur d’hypothétiques programmes de récupération d’engins ou de restes biologiques et sur la possibilité d’une origine « extra-terrestre de ces objets ou phénomènes observés ».
La réponse apportée est évidemment négative, banalisant le sujet, alors même que le sujet UAP semble être couvert par des clauses de secret du type Projets à Accès Spécial, ce qui pourrait sembler paradoxal. Par ailleurs les programmes historiques de recherches spatiales (Gemini, Apollo, etc…) mais aussi les « black programs » d’engins de reconnaissance (U2, SR71...) sont rappelés sans aucune information nouvelle.
Il en est de même pour les projets de recherche sur les UAP dans les années 1947 à 1969, comme Sign, Grudge, Blue Book. Le rapport ne révèle aucun détail sur les cas d’UAP présentant des caractéristiques étonnantes, en lien par exemple avec des observations électromagnétiques, comme celle du bombardier RB47 (enregistrement en 1957 des émissions EM d’un OVNI), ou celui du cas de la base Malmstrom de l'US Air Force, mentionné dans le dossier Blue Book1 présent dans les archives nationales (NARA), ouvertes au public. Il présente pourtant de fortes ressemblances avec le cas du RB47. Ces cas sont décrits dans le rapport SIGMA2 de 2021 avec toutes les références des archives américaines.
Les cas de la frontière nord-américaine (Northern Tier) ne sont en effet toujours pas analysés alors qu’ils concernent certaines bases stratégiques américaines (Malmstrom, Minot, etc.) de la frontière nord, qui ont été confrontées à des observations d’UAP enregistrés au radar, en présence d’émissions EM et même de brouillages.
Il en est de même pour le carrousel de Washington dont furent témoins les habitants de Washington en 1952 mais aussi des pilotes et contrôleurs radar de l’US Air Force (observations visuelles, prise en chasse par des chasseurs, observations radar).
Enfin il faut citer le cas de Lakenheath, avec des observations similaires faites cette fois par des contrôleurs et pilotes sur deux bases aériennes anglo-américaines de l’OTAN en Grande Bretagne (Lakenheath et Bentwaters) durant une nuit d'août 1956. Ce cas célèbre est désigné comme un cas de référence sérieux dans le rapport Condon de l’US Air Force (Le rapport Blue Book était peu enclin à confirmer le caractère étrange des OVNIs) mais aussi dans les archives de la CIA. Il est considéré comme l’un des cas les plus étonnants et non expliqué, plus de 70 ans après.
Il est dommage qu’aucun de ces cas ne soit évoqué dans ce document de l’AARO long de 50 pages, non pas pour affirmer l’existence ou la preuve d’une présence extra-terrestre, mais au moins pour confirmer l’existence de ces phénomènes, et décrire le caractère anormal de certains d'entre eux. L’enjeu est de poursuivre l’effort louable du rapport ODNI et NASA de 2023, et de comparer ces cas du passé à ceux plus récents, enregistrés avec les technologies actuelles. Cela consoliderait les éléments enregistrés depuis des décennies et permettrait de faire le lien avec les observations récentes faites par les pilotes de l’US Navy. Où sont les cas ? Quelles similitudes ? Quelles différences ?
En effet, des quelques 900 cas recensés par le Pentagone entre 1998 et 2023, 140 cas étaient non expliqués. L’ODNI en avait dressé une liste d’observables caractéristiques que nous avions rappelés dans notre article précédent (émissions électromagnétiques, luminosité, signatures optiques et radar, manoeuvrabilité inhabituelle avec des accélérations remarquables en partant d’une vitesse nulle jusqu’à plusieurs milliers de km/h). D’ailleurs un résumé de type « portrait robot » avait même été présenté en mai 2023 lors de la conférence de la NASA avec l’AARO, repris ensuite dans le rapport de la NASA paru en octobre 2023.
Il eut été intéressant de poursuivre dans cette voie. La comparaison des données objectives du passé et des enregistrements récents nous paraît être un sujet très intéressant, totalement oublié, car les phénomènes peuvent avoir évolué (formes différentes) ou posséder des caractéristiques identiques. C’est la raison pour laquelle nous ne ferons pas d’autres commentaires.
Tout au plus, pouvons-nous regretter également l’absence de quelques lignes d'explications sur le cas “Nimitz”, toujours aussi confidentiel, sans une ligne de l’ODNI.
Assistons-nous à une sorte de renversement de tendance où les cas les plus étonnants, ne seraient plus non-identifiés, mais devraient attendre quelque temps pour que de nouvelles mesures permettent finalement de dévoiler leur origine…
Quid du survol des zones sensibles ? Quid du comportement cinématique ? Quid des risques sécuritaires liés au survol de zones sensibles et aux risques de collision soulevés par la Marine américaine. Ont-ils disparu ? Que font les Russes ? Que font les Chinois ?
Il ne nous appartient pas d’émettre de critique. Faute de données, concentrons-nous sur nos travaux et nos échanges sur les observations radar, optiques et électromagnétiques. Les méthodes s’affinent, ce qui sera profitable plus tard. La comparaison de cas anciens et plus récents reste possible et nous poursuivons nos efforts.
Par ailleurs, une responsable scientifique gouvernementale canadienne a annoncé la parution d’un rapport sur les UAP à l’automne 2024. De même, le Japon se préoccupe du sujet et invite les USA à plus de coopération. Il y a sans nul doute des sujets d’investigation ailleurs.
Nous résumons ci-après rapidement certains des axes de travail de SIGMA2 présentés par nos experts à l’occasion de conférences. Le travail est minutieux et les avancées lentes mais intéressantes avec des observations parfois inattendues.
Pour revenir au continent européen, nous notons l’action menée par le député portugais Francisco Guerreiro lors d’une présentation le 20 mars 2024 au parlement européen afin de le sensibiliser sur le sujet des PAN et notamment le partage d’informations et la prévention des risques aéronautiques.
Il était accompagné d’une douzaine de personnes, parmi lesquelles, le Dr Villarroel (astronome suédoise dont les travaux sont présentés dans cet article), des pilotes témoins de rencontre avec des PAN (Ryan Graves ex-pilote de l’US Navy et Christian Van Heijst, pilote civil sur long courrier) mais aussi des représentants d’associations ufologiques (la coalition PAN des Pays-Bas, le CISU italien, UAP check français, etc). Le député Guerreiro a axé son intervention et celles de ses accompagnants pour plaider la cause des PAN en Europe, et éliminer le stigma pour les témoins et pilotes, et favoriser la collecte et le partage des données en transparence dans le réseau aéronautique et ses institutions. Sur ce point, il a été question d’améliorer les procédures de rapport par l’aviation civile et les pilotes en cas de risque de collision en les étendant aux rencontres avec des PAN, mais aussi d’introduire les PAN dans le domaine spatial de l’European Space Agency (ESA). L’exemple du GEIPAN a été cité comme référence à la collecte des données sur les PAN et à la construction de bases de données et d'information du public.
Toutefois, la proximité d’élections européennes reporte certainement les éventuelles discussions sur le sujet à l’horizon de l’automne 2024 avec une actualité internationale préoccupante.
Nous préparons par ailleurs avec le SCU, SUAPS et d’autres groupes d’ufologues scientifiques un webinaire sur les observables des PAN en mai 2024.
ÉTUDE DE CAS RADAR : ANALYSE DU CAS DE JERSEY
Le 23 avril 2007, à 14h09, Ray Bowyer s’apprête à débuter la descente sur Alderney aux commandes de son Trislander lorsqu’il remarque une vive lumière, droit devant lui et proche de l’horizon au-dessus des îles anglo-normandes. Alors commence une chasse à l’OVNI que l’on peut qualifier d’exemplaire tant elle est riche en initiatives pour partager l'information, susciter d’autres témoignages et recueillir des données.
L’observation a lieu en plein jour ; elle dure une douzaine de minutes ; le PAN a le bon goût de rester à la même position pendant que l’avion progresse à 130 nœuds vers le sud, permettant aux passagers du Trislander de partager l’observation de leur commandant de bord. Ray Bowyer a contacté le contrôleur d’approche de Jersey, Paul Kelly, qui va constamment échanger avec lui des informations de détection radar pour les croiser avec les observations visuelles (Figure 1). Plus encore, Paul Kelly sollicite d’autres pilotes en vol pour participer à la chasse.

Les circonstances sont donc favorables pour tenter de localiser, voire d'identifier2 le phénomène, si tant est que la chose soit possible, celui-ci ne faisant pas preuve par ailleurs d’un comportement extravagant ni de performances hors du commun. Mais force est de constater que les recherches et études menées jusqu’ici n’ont pas permis de proposer de solution ni même d’envisager une hypothèse digne d’intérêt qui relève du monde connu.
15 ans après l’événement, SIGMA2 a repris le dossier. De quoi dispose-t-on aujourd’hui ?
des témoignages oraux des acteurs (pilote, contrôleur, passagers) – des enregistrements, des détections radar restituées par le système ELVIRA3 ;
mais il n’y a pas d’enregistrement vidéo ni photographique ;
et hors les enregistrements radar, on ne dispose pas de données numériques ni de mesures précises.
La ligne d’étude de l’équipe SIGMA2 consiste à tenter d’établir un lien entre les détections radar enregistrées et les éléments de géométrie restitués d’après les témoignages de la perception visuelle du PAN puis, à partir de ce lien si tant est qu’il existe, élaborer et étudier des hypothèses de solutions.

En s’appuyant sur le récit du déroulement de l’événement et les témoignages, on a pu identifier (Figure 2), 5 groupements de plots primaires4 dont les positions et la cinématique sont cohérentes avec les données recueillies, mais dont les particularités UAP méritent une analyse fine ; en effet, pour certains de ces groupements de plots, il n’est même pas possible de déterminer s’il s’agit de bateaux ou d’aéronefs du fait de la faiblesse des valeurs de vitesses de déplacement mesurées, d’une part, et de l’impossibilité de déterminer l’altitude des plots primaires d’autre part (car les radars primaires sont en 2D, sans mesure d'altitude).

Par ailleurs, on observe de larges discontinuités dans la détection des points montrant la trajectoire des objets, le plus souvent irrégulières, mais pouvant aussi être régulièrement espacées comme par des « sauts de grenouille » (Figure 3)5: l’étude des caractéristiques de fonctionnement des radars impliqués dans le contexte météorologique et de l’état de la mer le 24 avril 2007 devrait permettre d’identifier l’origine des perturbations et préciser la nature et les caractéristiques des objets détectés.
Une démarche complémentaire est envisagée, qui vise à recréer virtuellement (Figure 4) les situations d’observation visuelle du PAN dans le but de préciser et expliciter le contenu des témoignages, et redonner corps à l’approche de l’étude à partir de l’image perçue par le témoin : en utilisant une vue adaptable en luminosité, en opacité de la couche de brume, et en taille du PAN, le témoin peut recréer ou préciser sa perception et la partager de meilleure façon. Une reconstitution dynamique sur simulateur d’A320 est également à l’étude.
ÉTUDE DES EFFETS ELECTROMAGNÉTIQUES (EME) DES UAP SUR L’ÉLECTRONIQUE
LE CAS DES F4 DE TÉHÉRAN (1976)
La caractérisation physique des PAN a toujours été une préoccupation et leur fugacité ne rend pas les mesures faciles. L’une des réponses à ce problème est la constitution de réseaux d’observation. Nous proposons ici une autre approche.
Il est arrivé, à de nombreuses reprises, que des véhicules, équipés de dispositifs électroniques (en particulier des aéronefs) soient l’objet de dysfonctionnements, lors de rencontres rapprochées avec des PAN. Ces situations, souvent décrites avec précision par les pilotes6 (en particulier en termes de distances), apportent de précieux renseignements, car ces aéronefs se comportent comme de véritables capteurs étalonnés.
Des normes définissent les niveaux de vulnérabilité (dysfonctionnement et destruction) des matériels civils ; des spécifications (classifiées) les complètent pour les matériels militaires. Notons au passage que ces normes et spécifications prennent en compte l’ensemble des menaces potentielles imputables à des agressions par des matériels de fabrication humaine, à une époque donnée ; elles conduisent donc à une certaine homogénéité sur l’ensemble des nations de haute technologie.
Il devient alors tentant de déterminer si, dans une scène donnée, à une époque donnée, il était possible (ou non) qu’une source embarquée de fabrication humaine soit la cause des rayonnements avérés sur la cible (notre aéronef capteur).
Nous avons entamé une mise en œuvre de la méthode sur un cas très bien documenté, à savoir le célèbre « cas de Téhéran ».
Le 19 septembre 1976, un OVNI apparaît au-dessus de la base aérienne de Mehrabad, en Iran. Un premier chasseur F-4 décolle pour « aller voir ». Il est victime d’une panne radio à 25 NM (45 km) de l’objet et rentre à la base. Un deuxième chasseur part avec la même mission ; il subit la même panne. Pendant son retour, il se sent menacé et veut tirer un missile AIM-9 Sidewinder. Son système d'armement ne fonctionne plus. Certains font l’hypothèse d’une attaque électromagnétique menée par l’OVNI.
Du point de vue de la compatibilité électromagnétique, les deux problèmes de couplage que sont la radio et le système d’armement sont de natures très différentes. Commençons par le plus simple, la radio.
La Panne Radio
La susceptibilité en matière de radio n’est pas définie par des normes, mais par les caractéristiques des composants électroniques (on capte tout ce que l’on peut dans la bande pour améliorer la portée). Notons que la bande est facile à déterminer de l’extérieur.
La question est donc de définir les caractéristiques de la source d’émission capable de saturer la chaîne de réception radio à une distance donnée. Le calcul est un peu fastidieux. Nous utiliserons l’indicateur usuel des professionnels qui résume les caractéristiques de la source d’émission conduisant au maximum de couplage sur la chaîne de réception : pf², produit de la puissance crête de la source par le carré de la fréquence. Et bien, pour saturer une radio à 45 km, il faut un pf² d’environ 0.1 W.Hz².

La synthèse mondiale des performances des tubes hyperfréquence au cours du temps est donnée par le tableau (Figure 5).
On ne peut donc rien conclure de définitif, si ce n’est qu’à cette époque, les sources ayant un pf² supérieur à 0.1 étaient des instruments de laboratoires très lourds, très volumineux, très gourmands en énergie et réputés « non embarquables sur avion » (à l’époque, on ne parlait pas encore, en Europe, d’armes électromagnétiques). On ne peut toutefois pas complètement écarter l’hypothèse d’une expérience secrète menée au-dessus de l’Iran, sur gros porteur, par une nation de haut niveau technologique.
La panne de l’électronique de commande de tir missile
Quant au dysfonctionnement du système d’arme, la question est beaucoup plus délicate. On sait que les niveaux d’agressions doivent être bien supérieurs aux précédents (donc des technologies embarquées beaucoup plus puissantes que celle identifiée ci-dessus dont le niveau de puissance était déjà réputé non embarquable sur avion). On a, en effet, une idée assez précise des niveaux de durcissement qui étaient spécifiés à cette époque. Toutefois, on ne connaît pas précisément la distance à laquelle l'interaction a eu lieu mais il semble que l’objet ait maintienu ensuite une distance de sécurité de 25 NM (45 km) avec le F-4 qui a récupéré ses capacités électroniques.
En revanche, on sait maintenant (ce n’était pas le cas en 1976) qu’une attaque menée contre un système d’arme de ce type ne peut pas se faire a priori sur une fréquence au hasard ; il faut une connaissance précise des fréquences de vulnérabilité de la cible. Leur acquisition in situ, en temps réel, nécessite un niveau dans le domaine de la guerre électronique bien au-delà de ce qui se pratiquait à l’époque parmi les grandes nations technologiques, même aux USA.
Bref, même si l’on écarte les hypothèses de l’époque allant jusqu’à l’incompétence des équipages, l’ensemble du tableau ne permet pas de conclure définitivement mais reste très troublant.
Nous poursuivrons dans l’utilisation de la méthode et recherchons d’autres cas qui pourraient se révéler plus aptes à des conclusions claires.
ANALYSE D’ÉCHANTILLONS
La compréhension du phénomène OVNI (au sens large), passe indubitablement par l’analyse d'échantillons issus d’un évènement PAN. Ces échantillons peuvent être classés en deux grandes catégories. D’abord, les échantillons émanant directement du phénomène (type échantillon métallique - G. Nolan et al, 20228). Nous avons mené des investigations en lien avec des échantillons mis à notre disposition par le Dr Jacques Vallée (Figure 6).
Figure 6 : Des analyses d’échantillons métalliques fournis par le Dr. Jacques Vallée ont fait l’objet d’analyses au microscope à balayage pour étudier les micro structures puis au spectrographe de masse pour la composition chimique – ces échantillons métalliques, réputés à forte teneur de magnésium et récupérés au Brésil dans les années 60 ont révélé du silicium à l’état pur, ce qui n’est ni une forme naturelle du Si (répandu sous forme de silice, SiO2) ni une forme réalisée par l’industrie des années 60.
D’autres types d’échantillons ont pu être analysés comme la matière vivante environnante ayant eu une interaction avec un phénomène PAN. Dans ce 2ème cas, il s’agit le plus souvent de végétaux mais des échantillons de sols peuvent également avoir « enregistré » un événement avec des traces mécaniques comme dans le cas de Valensole (1965), et celui de Trans-en-Provence, en 1981 (Figure 7).

Dans certains cas, la végétation elle-même, ou bien les tissus humains, peuvent avoir subi une altération chimique temporaire ou définitive qui semble être la conséquence d’un rayonnement énergétique (IR, micro-ondes, gamma, X, etc.). Cela a été caractérisé à Trans-en-Provence (1981) ainsi qu’à Valensole (1965) ou bien à Landévennec en Bretagne (1975). Des travaux d’analyse ont été menés sur les échantillons de végétation prélevés à Trans-en-Provence montrant l’altération de la chlorophylle.
Au sein de la Commission Sigma2, des études sont entreprises pour essayer de caractériser les effets électromagnétiques à partir d’échantillons récupérés et de(s) rayonnement(s) responsable(s) de cette détérioration. In fine, ce(s) rayonnements pourraient être de même nature que ceux responsables des dysfonctionnements électroniques des aéronefs ou véhicules. Des travaux sont à poursuivre pour en savoir plus notamment sur les mécanismes d’interaction.
OBSERVATION - LE RÉSEAU FRIPON
Le réseau Fripon de l’IMCCE est basé sur un réseau de caméras visibles fish eye, réparties sur le territoire français pour réaliser la détection et la trajectographie de météorites, en complétant la trajectographie optique par des mesures doppler au moyen de récepteurs radio fréquence passifs.
Une réflexion est en cours pour améliorer les traitements d’image des caméras avec l’apport de techniques d’intelligence artificielle, sujet qui pourrait recevoir une contribution de l’ONERA. On peut aussi imaginer une exploitation de données brutes.
Au-delà du réseau Fripon, on peut imaginer une boucle d’observation complémentaire bénéficiant de l’alerte détection du réseau Fripon pour pointer des senseurs du type caméras et spectroradiomètres pour étudier plus en détail des phénomènes mal connus, comme certains types de foudre en boule, comme les Phénomènes orageux transitoires (TLE), les Farfadet et même les PAN (Figure 8).
Le réseau « Farfadet » pourrait être complémentaire de cette boucle d’observation.
OBSERVATION : LE RÉSEAU FARFADET
Observations des phénomènes orageux lumineux de la haute atmosphère.
Unique en son domaine, le réseau de stations FARFADET constitue le cœur du programme de recherche éponyme initié, opéré et mené par le Laboratoire de Recherche sur la Foudre depuis 2019 pour étudier les phénomènes orageux lumineux de la haute atmosphère.
Le réseau FARFADET consiste en la mise en place de systèmes d'observations optiques (caméras) automatisées des "farfadets" (ou sprites). En abrégé, ils sont dénommés TLE (Transient Luminous Event) en anglais ou Phénomènes Lumineux Orageux Transitoires en français. Ces étranges phénomènes lumineux qui se produisent dans la haute atmosphère durant les orages intriguent les chercheurs. Ainsi, les "farfadets", les "sprites", les "elfes", les "jets bleus" (Figure 9) sont une partie de la kyrielle de phénomènes évanescents qui illuminent l'atmosphère entre le sommet des cumulonimbus (nuages d’orages) et la haute atmosphère, jusqu'à environ 200 km d'altitude, aux limites de l’espace. À ce jour, des centaines de farfadets ont été capturés, les données permettant d’améliorer grandement la typologie de ces phénomènes. Exerçant une surveillance permanente, le réseau FARFADET enregistre également toutes les autres manifestations atmosphériques dans le domaine du visible (bolide, nuages, aéronefs, passage ISS, éventuelle activité lumineuse, etc.).
Actuellement, six stations FARFADET (Figure 10) sont en service (dans les Alpes de Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, les Hautes-Alpes, l'Aisne, l'Ardèche et le Cantal) et permettent de collecter des données scientifiques précieuses sur ces phénomènes encore largement méconnus. Trois nouvelles stations seront mises en service en 2024 (dont deux à l’étranger), ce qui permettra d'étendre encore les possibilités de recherche et d'observation des farfadets.
OBSERVATION : PROJET VASCO
Le Dr Beatriz Villarroel a présenté les projets sur lesquels elle travaille lors du Webinaire 1 sur les observables des PAN organisé par 3AF et diffusé le 14 juin 2023. L'un d'eux porte sur la disparition et l'apparition de sources de lumières célestes pendant un siècle d'observations (VASCO) où astronomes, experts en machine learning et des scientifiques citoyens recherchent des objets en voie de disparition dans l'espoir de découvrir de nouveaux phénomènes physiques ou des techno signatures.
Pour les aider, les scientifiques utilisent des images pré-Spoutnik provenant des télescopes du Mont Palomar qui ont été exposées entre 1949 et 1956 et numérisées plus récemment, ainsi que des images modernes du ciel provenant de l’observatoire PanSTARRS (après 2015). Le vaste effort est réalisé à la fois avec des méthodes automatisées et des efforts de science citoyenne. Ces derniers sont menés en collaboration avec des scientifiques, des étudiants et des associations d’astronomie amateur en Afrique, notamment en Algérie et au Nigeria.
Le projet de science citoyenne a désormais rassemblé tous les résultats de sa première phase, et la rédaction du document est en cours.
Le projet a conduit à la découverte d'intéressants transitoires de courte durée (Villarroel et al. 2020, Astronomical Journal), et dans certains cas, vous pouvez voir plusieurs transitoires apparaître et disparaître dans une petite partie du ciel en peu de temps. Plusieurs exemples ont été montrés.
Dans un cas neuf étoiles de magnitude ~18 à 19 visibles sur une image du 12 avril 1950 prise au mont Palomar (voir Villarroel et al. 2021, Scientific Reports), disparaissent une heure plus tard. Il en est de même pour plusieurs objets alignés (Villarroel, Solano, Guergouri et al. 2022, arXiv), également pour trois étoiles très brillantes (Figure 11) d'une magnitude d'environ 15 à 16 provenant d'une image du 19 avril 1952 (Solano et al. 2023, MNRAS). Diverses hypothèses ont été présentées pour étayer ces résultats, notamment la contamination des plaques par des particules radioactives provenant d’essais de bombes atomiques non répertoriés, des effets de lentille gravitationnelle ainsi que la possibilité de voir réellement des objets artificiels en dehors de l’atmosphère terrestre à l’époque pré-Spoutnik.

L'exemple du triple transitoire des trois étoiles est curieux, en raison de l’étonnante coïncidence et synchronicité avec un célèbre événement OVNI (Washington UFO Flap 1952), c’est-à-dire le carrousel de Washington, véritable ballet aérien d’OVNI vus visuellement et au radar, pourchassés en vain par des avions de chasse dépassés par ces engins insaisissables. En découvrant cette coïncidence, il s'est avéré que le meilleur candidat (« Candidat 5 ») du journal avec les transitoires alignés (Villarroel, Solano, Guergouri et al. 2022, arXiv) s'est également produit pendant la crise de Washington, mais cette fois le 27 Juillet 1952 (le journal indique par erreur le « 28 juillet »). Plusieurs membres de l'équipe VASCO se sont maintenant joints pour lancer un nouveau projet, ExoProbe, qui vise à rechercher de tels transitoires étranges avec un équipement moderne soigneusement choisi dans le ciel moderne, dans l'espoir de vérifier le phénomène.
Le Dr B. Villarroel a été invitée à présenter ses travaux lors de l'audition sur les PAN au parlement européen le 20 mars dernier.
Observation en 1959 d’un OVNI depuis un chasseur F89 qui suivait un B52, lequel a réalisé des enregistrements des émissions électromagnétiques de l’OVNI, sur des fréquences similaires à celles enregistrées par le RB47 deux ans auparavant.
Localiser d'abord, voire identifier ensuite : dans le contexte qui nous intéresse, signifie être capable d’établir une relation d’identité objective entre le phénomène observé et un phénomène réputé connu (identifier un OVNI n’a pas de sens !).
ELVIRA : système de traitement, de transmission et de fusion des données radar qui était en service au moment des faits sur les îles anglo-normandes pour le contrôle du trafic aérien ; les données transmises et enregistrées ne sont pas des données brutes : elles ont été extraites des signaux-retours reçus par les radars à travers un processus de traitement analogique et infor- matique destiné à éliminer ce qui n’est pas directement utile au travail des contrôleurs d’opérations aériennes.
Plot primaire : représentation graphique, sur l’écran du contrôleur de trafic aérien, d’une détection radar brute d’un objet, retenue à l’issue du processus de filtrage (cf. supra). Par opposition, un plot secondaire désigne le plot d’un aéronef qui enrichit le signal radar retour par des informations d’identifica- tion, de position et paramètres de vol transmises via un trans- pondeur. Dans le cas Jersey, les plots primaires proviennent de 2 radars situés, l’un sur l’aérodrome de Guernesey-Alderney, l’autre sur l’île de Jersey (Les Platons).
La piste P1 (Frog leaps track) est représentative du phénomène de périodicité de la présence de plots sur la figure 3. Les plots issus du radar de Guernesey sont concentrés en paquets de 5 à 18 plots sur des périodes de l’ordre de la minute ; l’intervalle moyen entre les paquets est de 2 minutes. Les paquets de plots issus du radar des Platons (Jersey) sont moins fournis (4 à 8 plots par paquet) pour des périodes d’absence de 2 à 3 minutes, mais le phénomène cesse à 14:14, après quoi on observe une détection à chaque tour d’antenne.
A Preliminary Study of Sixty Four Pilot Sighting Reports Involving Alleged Electro-Magnetic Effects on Aircraft Systems.